eux, les pingouins et la tétine argentée + Jin Wardrope, anciennement Wanxù, est tiré du sommeil par un léger grincement. Luttant pour garder les yeux ouverts, il se redresse et jette un vague coup d'œil autour de lui. Le lit est fort haut et la petite chose à l'origine du grincement en question, pas plus haute que trois pommes. Jin s'affaisse de nouveau sur ses oreillers, sans remarquer que sa fille de trois ans vient de se faufiler dans sa chambre à pas de loup. Un instant plus tard, l'homme sursaute lorsqu'il sent les draps se tendre étrangement autour de lui. Ouvrant brusquement les paupières, il se retrouve nez à nez avec un gros pingouin souriant. Hébété, Jin se frotte vivement les yeux pour constater que ledit manchot n'est que le personnage haut en couleur cousu sur le ventre d'une grenouillère en velours. Une petite fille aux cheveux sombres, son bedon annonçant en jolies lettres rondes « moi, la banquise et les copains » s'efforce de grimper sur le lit comme une alpiniste chevronnée gravirait le mont Everest. Amusé, Jin regarde Nuo, ou Agatha, gagner laborieusement le sommet (pardon, la tête de lit) et, la mine satisfaite, tapoter les coussins autour d'elle avant de commencer une installation méthodique. Elle pose une à une ses affaires sur la couette et les aligne avec précision : d'abord le livre d'images, puis le biberon pour après, puis ses friandises du matin, puis...

- Petite Fille, qu'est-ce que tu fais ? chuchote le jeune papa.

- Il y a un crabe de feu sous mon lit, annonce froidement Agatha comme si elle ne pouvait tolérer qu'on ose ainsi investir un espace aussi personnel. Moi et monsieur Ronron on vient dormir avec toi.

Jin sourit et ne dit rien. Il regarde sa fille poser la délicate peluche en forme de chat contre un coussin et la border avec soin. Après quoi, la petite fille fourre sa tétine dans sa bouche d'un geste trop nonchalant pour être enfantin - on dirait une manie de fumeur invétéré. La pitchoune saisit son chat par le col et vient s'avachir de tout son poids sur le torse de Jin. Son expression hautaine pourrait être convaincante si elle n'était contrastée par ses petits bruits de succion contents. Tous les jeudis matins, Liu, sa femme, se lève plus tôt pour aller prendre le petit-déjeuner avec des amies. Tous les jeudis matins, une créature envahissante chasse mystérieusement Agatha de son lit ; en de pareille circonstance, Jin est habitué à voir sa chambre devenir un point de refuge idéal.

nous, le film et la poussière d'été + Il avait fallut tout changer, les paysages autant que les habitudes. En crée de nouvelles, adoucissant le gris des villes américaines. Il avait fallut découvrir un équilibre, discipliner la langue pour quelle laisse ces nouveaux mots, glisser. Et on glissait, ensemble d'éclats de rires, sur la patinoire. Des délices inconnus qu'on apprivoisait ensemble. Papa. Les salles obscures, elles conservées nos secrets. Nos chuchotis entrelacés, doigts en crèmes glacées et maman qui était si belle dans ses robes d'été. Elle illuminait les buildings, transformant les souvenirs en lampions de bals colorés. Et puis, papa. Il a fallut grandir. Grandir. Tout avait changé. Tout ça nous a changé.

moi, le monde et le couteau rouillé + Je me souviens, les premiers éclats de voix. Les murs que je franchissais. M'affranchir de ton amour et tout ce qu'il représentait. Je me souviens des premiers repas lourds de non-dits, où seul le bruit des couverts tranché sur la porcelaine. Je me souviens de tes paroles, de tout ce que tu disais. De tout ce que je n'avouais pas. Car les promesse après l'amour, ne tiennent pas. Et comme tu m'a juré le toujours, avant la déception et les portes qui claquent. Je me souviens des jours qu'ils étaient. Puis le couteau planté. C'est moi qui l'es fait. Et toi, tu as oublié.